travaux 2019-2024
groupement Claire Babet / Debitus / Le Bihan
Note d'intention (mars 2019) extrait
La cathédrale Saint-Gatien de Tours appartient à la mémoire collective et au présent patrimonial. Les baies de la nef datant du XV° siècle ont subi à plusieurs reprises les outrages du temps et les dévastations des intempéries (ouragans, pluies de grêles...), notamment en 1637, en 1664 et surtout en 1751 où les dégâts furent irréparables.
Au cours des siècles suivant, elles ont été remplacées par des verrières incolores dont « au soleil couchant l'effet était insupportable » selon le rapport de l'architecte Gustave Guérin en 1847. Toujours est-il que l'édifice gagnait en clarté et en transparence, deux éléments fondamentaux qui serviront de base à mon projet de vitraux aniconiques qui envisage plusieurs axes de travail.
En premier lieu, je me dois de me plier à leur fonction première, à savoir la transmission de la luminosité et de la transparence.
Si la nef est le pont de ce vaisseau de pierres où se réuniraient les fidèles pour une croisière spirituelle, l’enchaînement des voûtes perchées sur les piliers s'apparenterait aux mâts et aux voiles de ce gréement, tel un baldaquin géant et aérien, une enveloppe protectrice. Ce n'est que par l'interstice des vitraux que passe la lumière mais c'est aussi la lumière qui crée le mouvement.
La luminosité est non seulement essentielle, elle est vitale. Elle appartient au message même que veut transmettre la cathédrale.
La fonction du vitrail est donc d'établir un lien tangible et sacré entre la clarté céleste et la pénombre terrestre, entre l'au-delà et l'ici-bas. La lumière est autant source de vie qu'acte de foi. Mon projet se veut de sauvegarder cette fonction primordiale du vitrail.
À cette luminosité, il faut également conserver, voire transcender la transparence. De l'intérieur, le fidèle ou le simple visiteur pourra contempler à travers ces verrières les arcs boutants et les pinacles se dessinant comme des ombres protectrices et garantes de l'édifice.
Mais aussi de l'extérieur de la cathédrale où on pourra appréhender l'imposant volume de la nef et même d'en deviner le côté opposé.
D'un simple coup d’œil, le regard transpercera tout l'ensemble. Ainsi, les verrières sont davantage une invitation qu'une frontière.
Mon projet soulignera ainsi les principes architectoniques de ce vaisseau de pierre, se jouant des saisons et des caprices atmosphériques. À travers la transparence du verre se dessinera tantôt le bleu du ciel, tantôt le gris de la brume, uniformes ou changeants selon l'humeur des nuages. À travers cette transparence se devinera en quelque sorte le mouvement perpétuel du temps.
Au respect de la luminosité et de la transparence s'ajoutera la volonté d'accentuer la verticalité de l'édifice, comme élément fondamental de l'élévation architecturale et spirituelle du bâtiment. La cathédrale est hauteur, elle se lit de bas en haut, comme au pied d'une falaise à gravir.
Il doit en être de même concernant les vitraux, faisceaux de lumières obligeant le regard dans une escalade vers l'acmé, en défiant toute sensation de vertige. Ainsi mes bandes de couleurs, tels les lés d'un papier peint, contrediront l'horizontalité des barres de tiers et des vergettes.
L'ensemble se doit d'être aérien, léger, rassurant. Il ne s'agit pas d'écraser l'humain. Au contraire il faut l'entraîner doucement vers le haut, non pour le déraciner de son sol mais plutôt pour l'inviter à embarquer dans cette montgolfière de verre, de couleurs et de lumière.
Suite côté sud en 2025-2029